Natura Pictrix, hommage à Roger Caillois

Vue de l'exposition Natura Pictrix, hommage à Roger Caillois, montrant dans la vitrine de la galerie Abraham & Wolff des pierres peintes datant du XVIIe siècle, une plaque de paésine, une projection d'agate de l'artiste portugais Francisco Tropa et un frottage de Max Ernst ayant appartenu à Roger Caillois
Vue de l’exposition Natura Pictrix, hommage à Roger Caillois
Peinture à l'huile sur travertin de Filippo Napoletano datant du XVIIe siècle et représentant les anges annonçant la naissance du Messie aux bergers
Filippo Napoletano, cercle de, Les anges annoncent la naissance du Messie aux bergers, XVIIe siècle, huile sur travertin, 29 x 25,5 cm
Peinture à l'huile sur une plaque de paésine représentant une femme et un homme marchant dans un paysage rocailleux
Anonyme, [3 personnages peints sur paésine], huile sur une plaque de paésine, 14,5 x 27,5 x 4 cm encadrée
Peinture à l'huile sur travertin attribuée à un anonyme espagnol, datant du XVIIème siècle, représentant la Vierge Marie et l'Enfant Jésus
Anonyme, [huile espagnole sur travertin représentant la Vierge et l’Enfant], XVIIème siècle, huile sur travertin, 21 x 16 x 0,8 cm
Photographie datée de 2023 réalisée par l'artiste portugais Francisco Tropa obtenue à l'aide d'une lanterne magique projetant une lame d'agate
Francisco Tropa, Agate, 2023, impression jet d’encre sur papier montée sur aluminium, 71,5 x 71,5 x 4 cm encadré

Écrivain, penseur et collectionneur, Roger Caillois (1913-1978) fut l’une des figures les plus originales de la vie intellectuelle française du XXème siècle. Au cours d’une carrière riche et mouvementée, Caillois fut tour à tour proche du Grand Jeu puis des Surréalistes, fondateur du Collège de sociologie aux côtés de Georges Bataille et Michel Leiris, directeur de revue en Argentine, éditeur et traducteur promouvant en France les littératures sud-américaines (il révéla Jorge Luis Borges), puis fonctionnaire à l’Unesco et enfin membre de l’Académie française. 

Élaborée aux carrefours de disciplines multiples, son œuvre foisonnante compte plus d’une trentaine d’ouvrages sur des sujets aussi divers que les mantes religieuses, les mythes, le sacré, les jeux, le rêve, le mimétisme, la guerre, le fantastique ou les pierres. Ce corpus apparemment disparate trouve sa cohérence dans une grande idée qui obsédait Caillois : l’unité du monde. Selon lui, la nature serait tissée d’une seule et même trame qui se manifeste par des analogies cachées entre les phénomènes naturels. Recenser et classer l’ensemble des analogies qui unissent les différents règnes de la nature permettrait de mettre à jour la structure poétique du monde.

C’est en établissant un rapprochement de ce type entre les moirures métalliques d’un minéral, la labradorite, et les iridescences des ailes d’un papillon, le morpho, que Caillois commença à s’intéresser aux pierres. De simple sujet d’étude et de curiosité elles devinrent vite une véritable obsession. Fasciné par le pouvoir d’évocation de certains spécimens dans lesquels l’imagination croit reconnaitre la représentation plus ou moins fidèle d’objets réels, Caillois se mit à réunir les minéraux les plus étranges, les plus graphiques, les plus féconds en simulacres et en symboles, bâtissant une importante collection dont les plus belles pièces sont aujourd’hui exposées dans les musées parisiens. 

Lui qui se méfiait des charmes des beaux-arts et de la littérature, il ne se lassait jamais de contempler ses pierres à images. « Je préfère leurs dessins aux peintures des peintres, leurs formes aux sculptures des sculpteurs, tant elles me paraissent les œuvres d’un artiste moins méritant mais plus infaillible qu’eux. » (in Pierres, Gallimard, 1966) Le déchiffrement des pierres lui inspira ainsi l’une de ses grandes idées. Si l’on ne peut assimiler les minéraux à des œuvres d’art en tant que telles, c’est-à-dire à des créations délibérées, il semble néanmoins que la nature puisse parfois mériter le titre d’artiste et les pierres celui d’œuvres d’art naturelles. Natura pictrix, la nature peintre, comme l’appelait Caillois (in Méduse et Cie, Gallimard, 1960), s’impose alors comme une concurrente redoutable des artistes, ayant précédé avec audace leurs trouvailles d’hier et d’aujourd’hui. 

Cette réflexion originale doit beaucoup à l’étude souvent reprise par Caillois d’une pierre en particulier : la paésine. Les paésines sont des calcaires microcristallins dont les gisements se trouvent en Toscane, dans la région de Florence. Après coupe et polissage, ces pierres laissent apparaitre des motifs qui suggèrent de manière troublante toute une gamme de paysages : villes et villages aux édifices en ruine, panorama de gratte-ciels, falaises sur le littoral, grottes marines, mers déchainées, ciels tourmentés etc. D’où leur nom de marbre-paysage ou marbre-ruine.     

Les paésines suscitèrent l’engouement au XVIe et au XVIIe siècle. Très recherchées, elles ornaient les cabinets de curiosités des Médicis, de Gustave-Adolphe de Suède ou de Rodolphe II de Habsbourg. Elles entraient dans la composition de somptueuses marqueteries de pierre. Les plus saisissantes d’entre elles faisaient même l’objet d’encadrements qui leur conféraient le statut de véritables tableaux. Des tableaux naturels dont les artistes eux-mêmes reconnaissaient la valeur esthétique, pour ne pas dire artistique, au point de troquer parfois la toile pour le minéral. 

Sans doute aidés par des tailleurs de pierre, ils choisissaient les paésines, mais aussi les jaspes, les marbres ou les lapis-lazulis dont les couleurs et les veines se prêteraient le mieux à leur fantaisie et les peuplaient de personnages, d’arbres, d’animaux, d’objets. Des peintres comme Sebastiano del Piombo (1485-1547), Antoine Carrache (1583-1618), Johann König (1586-1642) ou Mathieu Dubus (1590-1665) profitèrent ainsi des décors naturels qui s’offraient à eux pour composer des scènes religieuses et mythologiques dans lesquelles art et nature dialoguent et se confondent. 

Natura Pictrix rend hommage au penseur original et au grand collectionneur que fut Caillois ainsi qu’à cette tradition de la peinture sur pierre qu’il a si bien mise en lumière. L’exposition réunit un choix de pierres peintes anonymes datant du XVIIe siècle, des paésines exceptionnelles, mais aussi un frottage de Max Ernst ayant appartenu à Caillois. C’est aussi l’occasion d’une rencontre entre création historique et art contemporain, avec des œuvres inédites du sculpteur Francisco Tropa, chez qui les lames d’agate occupent une place particulière. 

Prinz Gholam – There are Eyes

Vue de l'exposition There are Eyes de Prinz Gholam montrant des sculptures faites de pierres, des masques dessinés aux crayons de couleur et un extrait vidéo de performance
Vue de l’exposition There are Eyes de Prinz Gholam
Vue de l'exposition There are Eyes de Prinz Gholam montrant des sculptures faites de pierres, un masque dessiné aux crayons de couleur et un extrait vidéo de la performance intitulée There are Eyes
Diffusion de la performance intitulée There are Eyes (Prinz Gholam, There are Eyes, 2022, vidéo HD mp4 avec son, 43 min 12 s)
Vue de l'exposition There are Eyes de Prinz Gholam montrant des dessins performatifs réalisés au crayon de couleur
Vue de l’exposition There are Eyes de Prinz Gholam
Dessin performatif du duo Prinz Gholam réalisé au crayon de couleur représentant plusieurs personnages assumant des poses diverses
Prinz Gholam, Pavilion of Wild Pinks, 2021, crayons de couleur sur toile, 215 x 345 cm, signé et daté, unique
Sculptures en pierres collées représentant des visages réalisées par le duo d'artistes Prinz Gholam
Prinz Gholam, Pair, 2021, pierres et colle, 2 éléments, l’ensemble : ca 13 x 53 cm, unique
Masque performatif dessiné au crayon de couleur par le duo d'artistes Prinz Gholam
Prinz Gholam, Blue Hair, 2022, crayons de couleur sur papier, ruban élastique, ca 26 x 26 cm, unique

Formé de Wolgang Prinz (né en 1969) et de Michel Gholam (né en 1963), le duo Prinz Gholam a développé au cours des 20 dernières années une pratique de la performance dans laquelle les deux artistes utilisent leur corps pour réinterpréter des références culturelles très diverses allant de la peinture ancienne à la sculpture en passant par l’art contemporain, le cinéma ou les images médiatiques. Ces stéréotypes culturels, les deux hommes les intériorisent et les incarnent à travers des chorégraphies précises durant lesquelles ils exécutent une succession de poses soigneusement choisies, se déplaçant telles des sculptures vivantes. 

Lente et fluide, donnant à sentir le passage du temps, leur gestuelle ne cherche pas à approcher l’esthétisme d’une chorégraphie dansée. Dans leur alternance entre mouvement et moment de pose, les corps des deux artistes deviennent en effet moins le véhicule d’une émotion que d’une histoire, celle de la représentation du corps. En réinterprétant les images qui composent cette histoire, le duo montre comment nos corps et nos gestes – et avec eux notre identité – sont façonnés par l’assimilation d’un canon culturel dominant.

Chacune des performances de Prinz Gholam s’accompagne d’un processus intense de création de matériel visuel et d’éléments performatifs (vidéos, photographies, objets, installations) au sein duquel la pratique du dessin occupe aujourd’hui une place importante. Les deux artistes conçoivent le dessin comme un champ d’expérimentation dans lequel ils peuvent imaginer et projeter spontanément les gestes, les postures ou les accessoires qui feront partie de leur chorégraphie, ainsi que la manière dont ils entreront en relation. Sur de grands formats réalisés au crayon de couleur, ils mettent ainsi en scène une multitude de figures qui évoluent parfois dans une représentation de l’espace-même où aura lieu la performance. Une constellation de corps en liberté qui annonce la tonalité de cette dernière tout en préfigurant par l’image son processus de réactualisation de l’histoire.

Pour cette nouvelle exposition intitulée There are Eyes, Abraham & Wolff a le plaisir d’exposer des dessins de grand format réalisés à l’occasion de deux performances, L’esprit de notre temps (Mattatoio, Rome, 2021) et Similitude (Punta della Dogana, Venise, 2018), mais aussi une série de masques en papier et de visages composés d’assemblages de pierres qui témoignent de leur pratique multidisciplinaire. Récemment apparus dans le travail de Prinz Gholam, ces objets chargés historiquement et symboliquement que sont les masques sont venus accentuer le hiératisme et la théâtralité de leurs chorégraphies tout en approfondissant leur réflexion sur l’identité. Une recherche à laquelle semblent faire écho ces groupes de visages que les artistes réalisent à l’aide de pierre qu’ils glanent aux quatre coins du monde depuis plusieurs années. La projection vidéo de plusieurs extraits de performances permet au visiteur d’appréhender la relation complexe qu’entretiennent ces différents éléments.

Katinka Bock

Vue de l'exposition Katinka Bock qui montre un ensemble d'œuvres inédites dont des céramiques dans la vitrine de la Galerie Abraham & Wolff
Vue de l’exposition Katinka Bock
Ensemble inédit de sculptures de l'artiste Katinka Bock datant de 2023 exposée dans la vitrine de la Galerie Abraham & Wolff
Vue de l’exposition Katinka Bock
Sculpture en céramique émaillée verte de l'artiste Katinka Bock réalisée en 2023
Katinka Bock, I’m your man, 2023, céramique émaillée, 60 x 9 x 5 cm, unique
Oeuvre datant de 2023 de l'artiste Katinka Bock composée d'une toile bleue insolée, de trois moulages en bronze de noyaux d'abricot et d'une poignée en céramique.
Katinka Bock, Der blaue Sonnenstich, 2023, toile, céramique, bronze, 5 éléments : 80,5 x 130,5 cm, unique
Sculpture datant de 2023 de l'artiste Katinka Bock composée de deux pièces en céramique blanche imbriquées l'une dans l'autre
Katinka Bock, Pavillon (Reunification), 2023, céramique, 31 x 14 x 13 cm, unique

Abraham & Wolff est heureux de consacrer cette nouvelle exposition à l’œuvre de Katinka Bock. L’artiste nous a confié pour cette occasion une sélection de pièces tout droit sorties de son atelier qui comprend des monotypes et de petites sculptures. Elles sont montrées dans une scénographie qu’elle a spécialement élaborée pour notre espace.

On peut saisir à travers cet ensemble inédit l’essentiel des gestes clés et des thèmes qui caractérisent la pratique de l’artiste. Trois sculptures en terre brune marquées par une empreinte évoquant des écailles témoignent non seulement de l’intérêt de Katinka Bock pour les formes pliées et plissées mais aussi de l’attention particulière qu’elle accorde aux traces, motif récurrent qui traverse aussi bien son travail de sculpture que ses photographies ou ses monotypes. I’m your man, une pièce en céramique émaillée verte pensée pour venir souligner la limite du pan de mur auquel elle est accrochée, s’inscrit dans les recherches de l’artiste sur les notions de frontière et de seuil compris comme lieux de communication entre l’intérieur et l’extérieur des espaces où sont exposées ses œuvres. Autre source de réflexion importante, l’exploration de la séparation et du lien entre les corps semble inspirer une pièce composée de deux céramiques blanches emboitées l’une dans l’autre intitulée Pavillon (Réunification). Particulièrement sensible aux problématiques spatiales et temporelles, il arrive que Katinka Bock expose certaines de ses créations à des processus d’altération naturels, laissant le temps et l’environnement extérieur affecter l’œuvre, comme avec cette toile bleue fixée sur un châssis après avoir été insolée à certains endroits. Sur le bord supérieur du châssis sont disposés trois répliques en bronze de noyaux d’abricots qui rappellent d’autres moulages d’objets réels réalisés par l’artiste : poissons, cactus ou noyaux de cerises. 

Katinka Bock, Bruno Botella, Miriam Cahn

Vue de l'exposition Katinka Bock, Bruno Botella, Miriam Cahn ayant été :montrée à la Galerie Abraham & Wolff au mois de juin 2023
Vue de l’exposition
Sculpture en bois, céramique et métal de l'artiste Katinka Bock
Katinka Bock, C’est la taille qui compte, 2023, bois, céramique, métal, 3 éléments 62 x 12 x 17 cm
Dessin au crayon et aux pigments de l'artiste suisse Miriam Cahn
Miriam Cahn, o.t., 24.1.94, crayon et pigments sur papier, 26 x 36 cm
Dessin au pinceau à calligraphie de l'artiste français Bruno Botella représentant un motif inattendu et étrange comme une hallucination
Bruno Botella, Sans titre, 2021, pinceau à calligraphie, 25,5 x 36 cm

Pour ce nouvel accrochage, Abraham & Wolff est heureux d’exposer une sélection de dessins de Miriam Cahn et de Bruno Botella ainsi que quatre sculptures inédites de Katinka Bock.

Inspirée par les luttes féministes et contestataires, l’œuvre de Miriam Cahn puise son énergie dans la colère et l’indignation ressenties face à la violence et aux injustices. Tout comme sa peinture, ses dessins sont hantés par des thèmes comme le sexe, le pouvoir et la guerre. La représentation du corps conçu comme lieu d’exercice du pouvoir y occupe une place centrale. 

Les dessins de Bruno Botella prolongent les expérimentations plastiques et sensorielles à travers lesquelles l’artiste a tenté de prendre l’empreinte d’une activité psychique dans un objet sculpté. L’artiste y laisse aller le plus librement possible son pinceau à calligraphie afin de faire émerger, selon ses propres mots, une « image inattendue et étrange comme une hallucination ».

Qu’elles soient faites en céramique, en bois, en bronze ou en métal, les sculptures de Katinka Bock résultent souvent de gestes simples, directement lisibles dans leur forme : pliage, pression, chute, impression, enroulement, mise en équilibre. La sculpture intitulée C’est la taille qui compte est composée d’un morceau de bois taillé et façonné dont l’un des côtés tient en équilibre sur une tige en métal. À cette extrémité le bois présente un creux dans lequel vient se nicher une forme céramique blanche repliée.

Bruno Botella – Aaah?! On ne s’évade pas de Backwards Rock ?!! …

Dessin de l'artiste français Bruno Botella réalisé en 2021 au pinceau à calligraphie et représentant une image étrange et inattendue comme une hallucination
Bruno Botella, Sans titre, 2021, pinceau à calligraphie, 36 x 25,5 cm
Dessin de l'artiste français Bruno Botella réalisé en 2021 au pinceau à calligraphie et représentant une image étrange et inattendue comme une hallucination
Bruno Botella, Sans titre, 2021, pinceau à calligraphie, 36 x 25,5 cm
Dessin de l'artiste français Bruno Botella réalisé en 2021 au pinceau à calligraphie et représentant une image étrange et inattendue comme une hallucination
Bruno Botella, Sans titre, 2021, pinceau à calligraphie, 36 x 25,5 cm

Bruno Botella est l’auteur d’une œuvre expérimentale qui se caractérise par un processus de création affranchi des suggestions de la conscience. Cherchant à se déprendre de soi et de tout faire artistique, l’artiste élabore des dispositifs qui visent à prendre l’empreinte d’une activité psychique dans un objet sculpté. Il travaille les bras plongés dans des caissons qui lui rendent invisible son geste, sculptant parfois des matériaux insolites tels que de l’argile anesthésiante ou du qotrob, une pâte à modeler hallucinogène de son invention. En miroir de ces expérimentations plastiques et sensorielles, Botella entretient une pratique du dessin dont les recherches remontent aux premiers dessins animés qu’il a produits au sortir des Beaux-Arts de Paris. Avec cette nouvelle série, réalisée à Kyoto où il vit désormais, il s’efforce de rendre son geste le plus libre possible, laissant aller son pinceau à calligraphie sur la feuille pour faire émerger, selon ses mots, « une image inattendue et étrange comme une hallucination ». 

Imre Pán & Aurelie Nemours, Correspondances

Revue intitulée Les hors-textes de Morphèmes publiée par le poète, critique d'art et éditeur hongrois Imre Pan en 1965, contenant un poème et un collage original de l'artiste française Aurelie Nemours.
Aurelie Nemours, Imre Pan, Les hors-textes de MORPHÈMES, 1965, Cahier : 4 pp, 19,2 x 14,5 cm, Collage : papiers collés sur carton, 19 x 14 cm, signé, daté et numéroté VIII au dos, unique
Collage abstrait de l'artiste française Aurelie Nemours datant de 1965, réalisé partir de morceaux de papier noir, bleu et blanc découpés dans des journaux.
Aurelie Nemours, Sans titre (réalisé pour Les hors-textes de MORPHÈMES édité par Imre Pan), papiers collés sur carton, 19 x 14 cm, signé, daté et numéroté VIII au dos, unique
Collage abstrait de l'artiste française Aurelie Nemours datant de 1965, réalisé partir de morceaux de papier noir, jaune, blanc, rose et orange découpés dans des journaux.
Aurelie Nemours, Sans titre (réalisé pour Les hors-textes de MORPHÈMES édité par Imre Pan), 1965, papiers collés sur carton, 19 x 14 cm, signé, daté et numéroté II au dos, unique
Collage abstrait de l'artiste française Aurelie Nemours datant de 1968, réalisé partir de lettrages découpés dans du papier journal.
Aurelie Nemours, Sans titre, 1968, papiers collés sur carton, 19 x 14 cm, signé, daté et numéroté 7 au dos, unique
Sérigraphie abstraite de l'artiste française Aurelie Nemours datant de 1970, représentant un enchainement de carrés marron, orange, rouge et blanc autour d'un carré noir.
Aurelie Nemours, Sans titre, 1970-1971, sérigraphie, 16 x 12,5 cm, signée et numérotée 28/100
Sérigraphie abstraite de l'artiste française Aurelie Nemours datant de 1970, représentant un enchainement de carrés noir, bleu, rouge et jaune autour d'un carré blanc.
Aurelie Nemours, Sans titre, 1970-1971, sérigraphie, 16 x 12.5 cm, signé et numéroté 26/100

Les collages d’Aurelie Nemours sont une surprise. Visuelle. Plastique. Poétique. Pour qui s’est habitué.e, un peu distraitement, aux œuvres géométriques de la ligne – horizontale, verticale – et du point chez l’artiste, à son noir et à son blanc aussi rigoureux que sensuels, à ses aplats vibrant de couleurs monochromes, au vide profond, velouté, d’un infini répété qu’elle déploie de série en série, ses collages de 1965 et de 1968, réalisés à la demande d’Imre Pan pour les éditions qu’il conçoit de façon inlassable, entrecroisée, rhizomatique, fragmentée, et dont il reprend sans cesse l’intitulé (Signe, Signe Morphèmes, Signe L’art du dessin, L’estampe moderne, Morphèmes, Mini-Musée, Préverbes…), s’avèrent, à leur découverte, des ensembles d’une singulière unité et, surtout, un fructueux pas-de-côté de l’artiste.

Lorsqu’ils se sont dévoilés de leur papier de soie où ils étaient scrupuleusement mis à l’abri de la lumière naturelle, de la poussière longue du temps, des éventuelles déchirures ou pliures, lorsqu’ils se sont détachés de leur enveloppe de souple et mat papier cartonné vélin d’Arches qui les épouse à l’un des exemplaires de la revue Morphèmes, plus précisément le numéro 5 daté de 1965, et au poème « Équerre » de l’artiste, ce fut un miroitement éblouissant d’aplats larges ou en lanières découpées, de couleurs vives, entrecoupées, enchevêtrées, entrelacées, une modulation d’obliques, une ondulation de bleu, de vert, de rouge, de jaune, une danse ou plutôt une chorégraphie si peu austère de lettres typographiques jouant du fragment et du caché, venu d’un papier magazine ordinaire de la société moderne et consommatrice du début des années 1960 qui ouvraient à de nouvelles avant-gardes artistiques ne dédaignant pas redécouvrir la technique du collage et des papiers peints. Ainsi le Pop Art. Si les collages si originaux d’Aurelie Nemours sont une surprise, ou s’ils sont à chaque fois un étonnement, ils n’étaient pas des inconnus du travail de l’artiste de Rythme du millimètre ou Structure du silence… à tout le moins des oubliés que Serge Lemoine et Marianne Le Pomméré firent revenir au visible d’une exposition et d’un catalogue en 2001, au Musée de Grenoble, dans Aurelie Nemours. Pastels. Gouaches. Collages.

Mais l’oubli, encore, les menace, vingt ans après…

Les faire revenir, aujourd’hui, en 2023, dans la vitrine de la galerie Abraham & Wolff, dans une présentation discrète et modeste, attentive à la fois à ce qu’ils sont en tant qu’œuvre plastique unique et en tant que partie prenante d’une édition unissant poésie et forme visuelle, d’une édition qui dissout les frontières arbitraires entre le littéraire et les arts visuels, c’est faire revenir au jour l’un des exemples les plus riches et sensibles de collaboration entre un critique d’art poète et une artiste poète. Et par cette « association » qui se réalise sous le format de la publication éditoriale – le grand projet ou le grand œuvre d’Imre Pan dans ses années parisiennes –, Aurelie Nemours rejoint des artistes amies comme Marcelle Cahn, des artistes – dont sans nul doute elle est plus éloignée – soutenus et inlassablement exposés, montrés par Imre Pan depuis son installation à Paris, tels que Étienne Hadju, Victor Vasarely, Geneviève Asse, Corneille, Roberto Matta, André Marfaing, Christine Boumeester, René Bertholo, Sonia Delaunay, Jacques Doucet, Arpad Szenes, Ida Karskaya, et, un peu plus tard, Lourdes Castro, Milvia Maglione, Colette Brunschwig…

Imre Pan, qui crée, à partir de 1960, ces éditions de petit ou moyen format, à tirage limité, publiées sous forme de cahier imprimé composé d’un texte critique dont il est l’auteur ou d’un poème d’artiste comme pour Aurelie Nemours, et accompagnées d’une œuvre originale inédite (eau-forte, dessin, aquarelle, gouache, pastel, collage), s’inscrit dans la généalogie de ce synchrétisme des arts des premières avant-gardes de la modernité du début du XXe siècle. Pan le perpétue, le maintient, le renouvelle, le réactualise tout au long de cette décennie des années 1960 qui invente et s’interroge sur d’autres possibles d’usages des matériaux et de nouveaux langages formels où l’écrit et la lettre redessinent des surfaces, rythment des blancs et des espaces typographiés, où se déploie au sein de groupes artistiques expérimentaux, au Brésil, aux États-Unis, en France, en Italie, au Portugal, une poésie visuelle, concrète, sonore. Les collages d’Aurelie Nemours, s’ils s’ancrent dans la lignée cubiste de ceux de Kurt Schwitters, par exemple, ne peuvent pas ne pas être regardés à l’aune des nouvelles formes poétiques et musicales contemporaines, et de cette pratique renouvelée du collage.

Aurelie Nemours et Imre Pan se rencontrent en 1963. Leur collaboration s’étend tout au long de la décennie. Elle s’initie à travers la publication d’une poésie de l’artiste dans le premier numéro de la revue Morphèmes (janvier-février 1963) :

« L’herbe
Le souffle
Les vols voluptueux
Les trilles secrètes
Le chant
L’astre en filigrane pour matin
De Gloire
Insolite la vérité de ce martyr
Dans notre mémoire d’innocence »

Le second numéro de la revue (mars-avril 1963) – qui est accompagné d’une eau-forte de Geneviève Asse – accueille un nouveau poème d’Aurelie Nemours :

« La trace 

L’éclair

L’Instant
L’espace donné de charité

L’impondérabilité
La face »

En 1965 ou 1964, donc, Imre Pan invite Aurelie Nemours à réaliser un ensemble de vingt collages qui sont publiés dans le numéro 5 des Feuillets de Morphèmes ou Hors texte de Morphèmes daté de 1965. L’artiste compose un nouveau poème, « Équerre », sorte de réponse regard vers ces œuvres pour elle inédites dans sa pratique, et d’aucun.es s’accordent à considérer qu’elle y attacha peu d’importance. Faut-il écouter Aurelie Nemours ? L’unité et la singularité de l’ensemble, qui sera complétée en 1968 par la création d’une nouvelle série de vingt collages numérotés et signés, toujours à la demande d’Imre Pan, laissent à imaginer qu’il y a moins eu indifférence de la part d’Aurelie Nemours qu’expérimentation esthétique et méditative.

Les collages de 1968 n’ont jamais été publiés dans l’édition qui était probablement envisagée par Imre Pan. Ils se caractérisent également par une unité visuelle proche de la partition musicale fragmentée, l’artiste explorant davantage les torsions et les découpes du mot, de son unité-signe, la lettre. C’est sans doute dans l’insolite de ces collages restés esseulés de leur publication que se manifeste avec le plus de prégnance les échos d’une poésie concrète et sonore dans le silence même des écarts de blanc, dans les rythmes sinueux de coupes typographiques inattendues, et inventives d’une nouvelle plasticité du mot matière et de sa forme détachée.

Regarder les collages d’Aurelie Nemours, c’est mobiliser le mobile et le méditatif, le mouvement et l’énergie de l’espace ; c’est se tourner vers le contemporain du fragment et de la découpe, de la césure et de l’étale, particulièrement si l’on reste à l’écoute des pièces de 1968. Si la demande est : les collages d’Aurelie Nemours sont-ils des poèmes ? L’affirmatif est la réponse.

Marjorie Micucci, avril 2023

Laura Lamiel

Dessin à l'encre de chine noire de l'artiste française Laura Lamiel datant de 2012 représentant des cercles concentriques dessinés à l'aide de fines hachures
Laura Lamiel, 3 ans, 3 mois, 3 jours, 2012, encre de chine sur papier, 83 x 73 x 3 cm encadré, unique
Dessin à la mine de plomb et à l'encre rouge de l'artiste française Laura Lamiel datant de 2020 représentant deux mains jointes
Laura Lamiel, Territoires intimes, 2020, encre de chine, stylo, mine de plomb sur papier, 42 x 29,7 cm, 48 x 35,5 cm encadré, unique
Dessin à la mine de plomb et à l'encre rouge de l'artiste française Laura Lamiel datant de 2020 représentant des lèvres et une langue
Laura Lamiel, Territoires intimes, 2020, encre de chine, stylo, mine de plomb sur papier, 42 x 29,7 cm, 48 x 35,5 cm, encadré, unique
Dessin à la minette plomb et à l'encre rouge de l'artiste française Laura Lamiel datant de 2020 représentant deux mains
Laura Lamiel, Territoires intimes, 2020, encre de chine, stylo, mine de plomb sur papier, 42 x 29,7 cm, 48 x 35,5 cm encadré, unique

Essentiellement connue pour ses installations, Laura Lamiel (née en 1948) n’a eu de cesse d’entretenir une pratique du dessin tout au long de sa carrière. 

En 2018, le développement d’une installation intitulée Forclose fut l’occasion pour l’artiste d’élaborer des motifs dont elle décrit ainsi la production : « j’ai décidé de déplier cette pièce (Forclose) et j’ai commencé à réaliser des dessins qui ont pris leur autonomie. Je les ai réalisés, pendant plusieurs mois, tard dans la nuit. J’avais l’énergie, mais je devais attendre qu’elle arrive, il me fallait avoir le geste juste. Je prépare les encres et les papiers, puis arrive un moment de la nuit où c’est bon, je peux y aller, et cela peut durer deux ou trois heures. J’ai commencé à dessiner tout un vocabulaire de langues ; je me suis précipitée sur des feuilles de papier en les barbouillant (…), en ouvrant la bouche, en faisant sortir des têtes, des rhizomes, des plantes. » (Entretien avec François Piron, in LL, Paris, Paraguay Press, 2019). Poursuivie durant le confinement de 2020, cette série intitulée Territoires intimes se compose également de poumons, de mains ou de visages pris dans des entrelacs de traits. Bien qu’impulsif et empreint d’une violence que soulignent des encres rouges évoquant l’énergie du sang, l’ensemble dégage une impression de fragilité et de sérénité. 

Cette ascèse du travail, l’artiste l’avait déjà pratiquée auparavant, dans une série de grands dessins circulaires se présentant sous la forme de myriades de traits de plume rituellement alignés pour former des cercles concentriques. Ayant pour titre 3 ans, 3 mois, 3 jours, en référence à la durée traditionnelle de la retraite que doivent effectuer les aspirants lamas dans le bouddhisme thibétain, ces dessins s’apparentent à des exercices spirituels basés sur la répétition. Celui que nous exposons est ainsi composé par la répétition de la syllabe « om », en référence au mantra bouddhiste Om mani padme hum, dont les syllabes sacrées doivent conduire le récitant vers l’illumination. Il est accompagné de trois dessins de la série Territoires intimes

Ces œuvres de Laura Lamiel sont exposées en collaboration avec la galerie Marcelle Alix (Paris). 

Laura, Massimo, Sergio, Mario, Ludovico, 5 designers pour VENINI

Vue de l'exposition Venini à la galerie Abraham & Wolff
Vue de l’exposition
Mario Ticcò pour Venini, Boletus, 1970, verre, ensemble de 2 lampes : 56 x 30 cm la plus grande
Mario Ticcò pour Venini, Boletus, 1970, verre, ensemble de 2 lampes : 56 x 30 cm la plus grande
Sergio Asti pour Venini, Sans titre, 1970, verre, ensemble de 3 vases (32 x 25 cm pour le plus grand)
Massimo Vignelli et Laura Diaz de Santillana pour Venini, Tessuto, 1982, verre, ensemble de 2 lampes : 24 x 22 cm chacune
Ludovico Diaz de Santillana pour Venini, Grata, 1960, verre, métal, 70 x 20 cm

Après les créations d’Alfredo Barbini (1912-2007) et d’Ettore Sottsass (1917-2007), Abraham & Wolff est heureux d’exposer pour sa troisième collaboration avec la galerie Compasso (Milan) le travail de la verrerie d’art Venini.

Considéré comme l’une des figures emblématiques de l’art du verre du XXe siècle à Venise, Paolo Venini (1895-1959) est né à Milan où il se forme en droit. Il fonde en 1921 avec Giacomo Cappellin (1887-1968) une entreprise verrière à Murano. Les deux hommes se séparent quatre ans plus tard. Venini s’associe alors avec le sculpteur et designer Napoleone Martinuzzi (1892-1977). Sous la direction de Venini – lui-même concepteur d’objets en verre –, l’entreprise va révolutionner la verrerie artistique moderne grâce à une approche stylistique qui associe innovation, sensibilité aux exigences des marchés internationaux et maîtrise des techniques traditionnelles de production de Murano. Dès les années 20, les pièces issues des fourneaux de Venini se distinguent ainsi par le travail extrêmement détaillé des maitres verriers, une riche palette chromatique et un design très en avance sur son temps. Cette combinaison entre sophistication esthétique et savoir-faire séculaire ouvert à l’expérimentation va permettre à Venini de remporter un important succès critique et public. 

Au fil des décennies et des directions artistiques, Venini a poursuivi ses recherches stylistiques en s’attachant quelques-uns des meilleurs designers, artistes et d’architectes de son temps, parmi lesquels Gio Ponti (1891-1979), Carlo Scarpa (1906-1978), Fulvio Bianconi (1915-1996), Tyra Lundgren (1897-1979), Tapio Wirkkala (1915-1985) ou Timo Sarpaneva (1926-2006). Après la mort de Venini en 1959, la compagnie est demeurée fidèle à l’esprit de son fondateur, développant des collaborations fructueuses avec de nouveaux créateurs tels Ettore Sottsass (1917-2017) et Alessandro Mendini (1931-2019), mais aussi avec une nouvelle génération de designers et d’architectes internationaux comme Tadao Ando (né en 1941), Peter Marino (né en 1949) ou encore Ron Arad (né en 1951). 

Aujourd’hui les créations de Venini font notamment partie des collections permanentes du Metropolitan Museum (New York), du Cooper Hewitt, Smithsonian Design Museum (New York), du Museum of Modern Art (New York), de la Fondation Cartier (Paris) et du Victoria and Albert Museum (Londres). 

Abraham & Wolff expose une sélection de lampes et un vase nés de la collaboration de Venini avec les designers Sergio Asti (1926-2021), Ludovico et Laura Diaz de Santillana (1931-1989 et 1955-2019), Mario Ticcò et Massimo Vignelli (1931-2014).  

Miriam Cahn

Vue de l’exposition
Miriam Cahn, (schauen), dec. 1988, crayon sur papier, 30 x 120 cm
Miriam Cahn, ATMEN, 18.3.2013, scan, 4 éléments: 1/4: 19.5 x 28.5 cm, 2/4: 28.5 x 18 cm, 3/4: 27.5 x 20.5 cm, 4/4: 19 x 28.5 cm
Miriam Cahn, berlin mit fluss + durchsichtigen hügeln träumen, 11.4.06, crayon sur papier, 46 x 41 cm
Miriam Cahn, überlebender, 8.2.98, crayon sur papier, 30 x 21 cm
Miriam Cahn, o.t., 5.8.10, 2010, pastel à l’huile sur papier, 2 elements, l’ensemble : 24.5 x 71 cm, 1/2 : 24.5 x 32 cm
Miriam Cahn, o.t., 5.8.10, 2010, pastel à l’huile sur papier, 2 elements, l’ensemble : 24.5 x 71 cm, 1/2 : 24.5 x 32 cm
Miriam Cahn, beschuss, 28.12.08, graphite sur papier, 30 x 42 cm

En écho à l’exposition intitulée Ma pensée sérielle qui lui est consacrée du 17/02/2023 au 14/05/2023 au Palais de Tokyo, Abraham & Wolff met à l’honneur le travail de l’artiste suisse Miriam Cahn en exposant une sélection d’œuvres inédite ainsi qu’un de ses carnets de dessin datant de 1978.

Fleur dans un verre d’eau, personnage au regard sidéré, scène de bombardement, route serpentant entre des collines, série de visages fantomatiques ou scans témoignant du travail photographique et sculptural de l’artiste, cet ensemble donne à voir les multiples facettes d’une œuvre hantée par la violence sociopolitique, les images médiatiques et les problématiques féministes.

Jean-Marie Perdrix

Vue de l'exposition de Jean-Marie Perdrix regroupant un ensemble de sculptures en fonte de plastique issu de la série des Yabas, une sculpture en fonte de plastique coulée dans une peau de chèvre et une sculpture en fonte de fer
Vue de l’exposition de Jean-Marie Perdrix
Sculpture de l'artiste français Jean-Marie Perdrix réalisé au Burkina Faso en 2014 en fonte de déchets plastique coulée dans une peau de chèvre
Jean-Marie Perdrix, Sans titre, 2014, fonte de déchets plastiques, poils de chèvre, 18 x 28 x 25 cm
Ensemble de huit sculptures de l'artiste français Jean-Marie Perdrix intitulé Yabas, réalisé au Burkina Faso entre 2002 et 2017 en fonte de déchets plastiques
Jean-Marie Perdrix, Yabas, 2002 – 2017, fonte de déchets plastiques, ensemble de 8 sculptures, dimensions variable (88 x 36 x 12 cm chacun)
Sculpture de l'artiste français Jean-Marie Perdrix intitulée Votre paire, réalisée en 2017 au Burkina Faso à l'aide d'une peau de scrotum de zébu et d'un oeil de verre
Jean-Marie Perdrix, Votre paire, 2017, peau tannée, oeil de verre, 18 x 28 x 17 cm
Sculpture de l'artiste français Jean-Marie Perdrix intitulée Forme insaisissable, réalisée en 2017 avec de la fonte de fer
Jean-Marie Perdrix, Forme insaisissable, 1987 – 2017, fonte de fer, 61 x 17.5 x 6 cm

Artiste plasticien français, Jean-Marie Perdrix (né en 1966) a élaboré son œuvre loin du cadre institutionnel et marchand. Ses sculptures sont le fruit d’un lent processus contextuel fait d’une rencontre avec un lieu et ses spécificités humaines, sociales et économiques. Travaillant la fonte, le plastique et le bronze, l’artiste a mené de longues recherches sur les diverses techniques de fonderie qui l’ont conduit dans des ateliers et des usines en Géorgie, en Serbie, au Mexique, et surtout au Burkina Faso. Dans ce pays, à Koudougou, l’artiste s’est lié d’amitié avec des maitres bronziers avec lesquels il a notamment réalisé une impressionnante série de moulages à la chair perdue. Bustes de chiens, têtes d’ânes et de chevaux où la fonte de métaux vient se mêler aux ossements et au charbon, laissant en évidence les stigmates des transformations violentes par lesquelles est passée la matière.     

Sensibles à la question de la pollution en Afrique, Perdrix et ses collaborateurs burkinabés ont également mis au point une technique pour recycler et fondre les déchets des sachets plastiques. A partir de cette matière, l’artiste a notamment réalisé la série des Yabas (2002-2023), des moulages en plastique noir d’un authentique totem, avant de mettre en place – toujours en collaboration avec ses partenaires locaux – une activité pérenne de recyclage de ces déchets néfastes en mobilier scolaire. Les objets issus de cette production sont ainsi emblématiques d’une pratique qui noue sans didactisme les questions artistiques, sociales et politiques. 

L’œuvre de Jean-Marie Perdrix a été exposée à l’IAC en 2018 à l’occasion du projet Otium#3, à la Marian Goodman Galery (New York) en 2017, à la biennale d’art contemporain de Rennes en 2016, et à la Fondazione Giuliani (Rome) en 2013, à l’occasion de l’exposition The Promise of Melancholy and Ecology, curatée par Chris Sharp. 

Pour cette nouvelle exposition, Abraham & Wolff est heureux d’exposer une sélection d’œuvres qui comprend une sculpture moulée en fonte appartenant à la série des Formes insaisissables (1987 – 2017), une œuvre appartenant à une série intitulée Votre paire (2017), une sculpture appartenant à un ensemble de pièces élaborées à partir de plastique recyclé coulé dans des peaux de bête retournées, ainsi qu’un ensemble de huit Yabas.